Le bâtiment mou : Une nouvelle forme d’architecture au service de la transition énergétique

Auteurs :

Lauriane Gorce, Mines Paristech

Alexandre Thiery, Mines Paristech

Cadre du projet :

Le gouvernement français l’a bien compris, il faut accélérer la transition énergétique. Le bâtiment étant le secteur d’activité le plus consommateur d’énergie (il consomme à lui seul, près de la moitié de l’énergie finale en France), il s’agit alors d’étudier toutes les solutions possibles pour réduire la consommation du résidentiel et du tertiaire (bureau, commerces…). Cependant, les technologies développées actuellement, de part leurs contraintes et caractéristiques propres, peinent parfois à remplir les autres fonctions au cœur du secteur du bâtiment, que sont le confort, l’urbanisme et le design par exemple. Le développement de tuiles photovoltaïques mené par Tesla atteste de l’importance du design pour l’utilisateur du bâtiment, réticent à installer des panneaux photovoltaïque. Il est également très complexe d’intégrer ces technologies peu flexibles sur des bâtiments existants qui,pourtant, consomment énormément d’énergie.

Dans cette article, nous introduisons un concept novateur d’utilisation de la robotique molle aux bâtiments. Sa grande flexibilité permet une intégration facilitée dans des bâtiments résidentiels ou tertiaires, installés ou nouveaux. Cette technologie offre également un tout nouveau champs d’exploration pour l’architecture de façades intelligentes et adaptatives qui pourrait révolutionner le concept d’urbanisme.

Nous expliquerons ici quelques pistes d’application de la robotique molle dans le bâtiment en présentant les prototypes réalisées lors du workshop de la semaine PSL à l’ENSAD 

 

 

 

 

 

Les volets mous et intelligents :

Le premier objet que nous voulions développer est un volet mou qui produirait de l’ombre lorsqu’il y a du soleil. Il s’agirait d’un objet passif qui n’aurait pas besoin de capteur et serait donc plus performant qu’un store classique. Sa flexibilité permet aussi d’innover sur sa forme.

La technologie est simple. Il s’agit en faite de deux éventails d’un côté et de l’autre au dessus de la fenêtre qui s’étendraient grâce à un matériaux qui gonfle avec la température. La température caractéristique de dilatation du silicone étant de l’ordre de 70°C, il faudrait peut-être penser à un dispositif focalisant les rayons du soleil pour chauffer l’objet et le faire gonfler efficacement.

Cependant, le cahier des charges d’un tel objet rend sa réalisation difficile. En effet, il faut que l’objet étendu ai une portée de 90 degrés afin que les deux éventails puissent bloquer les rayons du soleil. Mais il faut également minimiser la portée de l’objet lorsqu’il n’est pas étendu pour ne pas obscurcir la vue de l’utilisateur. Son placement en haut d’une fenêtre sur un bâtiment exige également que l’on prenne en considération le poids de l’objet, sa robustesse,…

Afin de réaliser un prototype de ce volet mou et intelligent qui répondrait à ces critères, nous avons produit différents prototypes.

Prototype 1 : Tout silicone

Le premier prototype utilise un silicone remplit de trous d’air. Il permettra de tester la faisabilité du système.

Le réseau de trous et l’épaisseur de silicone permet de gonfler la structure latéralement et de minimiser les mouvements verticaux. Plusieurs moules ont étaient utilisés pour jouer sur l’épaisseur et la géométrie jusqu’à l’obtention des deux structures suivantes :



Si le mouvement obtenu est intéressant, il ne répond pas à la problématique de manière satisfaisante, le déplacement latéral étant trop faible.

Prototype 2 : Eventail

Ce deuxième prototype mixe la robotique molle à des parties rigides plus classiques. Il s’agit d’un éventail se déployant grâce au gonflement de silicone intercalé entre les parties rigides.


Le prototype de test ci-dessus montre son fonctionnement. Nous arrivons à pousser la deuxième pale de l’éventail d’une dizaine de degrés, ce qui montre que le mouvement souhaité pourrait être attient avec moins de 5 pales. Mais l’objet au repos prend déjà de la place (les pales en noir sur les photos doivent pouvoir retenir le silicone) et de plus petites pales signifierait de plus petit silicone donc une poussée moins élevée.

Prototype 3 : Origami

Le troisième prototype réalisé est un origami se dépliant grâce à des structure gonflante avec de l’air.

Cette réalisation assez simple permet d’obtenir des résultats satisfaisants. Une seule poche d’air permet de gagner une dizaine de degré et l’objet peut garder une petite taille lorsqu’il est plié.

Il y a ici un problème de résistance cependant qui se posera lors de l’installation sur un bâtiment, qu’il nécessitera de résoudre.

Prototype 4 : Silicone chauffante

Ce dernier prototype s’inspire du premier mais a été réalisé à partir d’un matériaux qui gonfle à la chaleur. Pour l’expérience, un réseau de fil résistif a été inséré dans la structure puis chauffé par une alimentation électrique. Nous cherchions à nous rapprocher de la structure réelle passive qui se déploiera sous l’action de la chaleur des rayons du soleil.



Si il y a bien gonflement, les résultats sont peu concluants.

Des installations designs pour une isolation thermique variable

L’isolation thermique du bâtiment est primordiale pour l’efficacité énergétique. Elle permet, en hiver, de garder la chaleur à l’intérieur est donc de minimiser les besoins en chauffage, et en été de repousser la chaleur extérieur. C’est pour cette raison que les doubles vitrages sont si importants pour combattre les pertes thermiques du bâtiment. Mais on remarque que beaucoup de pertes ont lieu au niveau des étages également (comme le montre la photo ci-dessus). Le rajout de matière molle à certains endroits stratégiques permettrait alors de combattre ces pertes tout en apportant une touche design et moderne au bâtiment.

Un autre avantage lié à cette technologie serait que la résistance thermique serait alors variable. En effet, c’est l’air contenu dans ces robots mous qui bloquerait les échanges thermiques (à l’instar de ce qu’il se passe dans les doubles vitrages). La quantité d’air pourrait donc être modifiée par l’utilisateur ou automatiquement. Une résistance variable permettrait, par exemple, la nuit en été, de récupérer la fraicheur extérieure dans le bâtiment avec une résistance faible, tout en la bloquant la journée avec une résistance élevée.

Des panneaux photovoltaïques flexibles

La robotique molle peut également se mettre au service de l’intégration des énergies renouvelables au bâtiment. En effet, il serait possible d’installer des panneaux photovoltaïques sur des structures molles et flexibles pouvant plus facilement suivre le soleil ou permettre une disposition innovante et changeante de la toiture solaire.